Le débarquement allié et l’insurrection

Le débarquement allié et l’insurrection

Le 6 juin 1944 les Alliés conduisent une vaste opération d’envahissement et de libération de l’Europe sur les côtes normandes, qui provoque aussitôt une phase insurrectionnelle en France.

Le débarquement du 6 juin 1944

La Résistance française est en effet engagée dans cette opération militaire planifiée de longue date : afin d’appuyer le débarquement elle doit paralyser le réseau ferroviaire et le réseau routier (plans Vert et Tortue), mais aussi saboter les lignes téléphoniques et les lignes à haute tension (plans Violet et Bleu) et fixer des divisions allemandes par des combats (plan Rouge). En Dordogne, la Résistance mène de nombreuses actions à la suite du débarquement allié : les sabotages s’intensifient et isolent le département alors que de nombreux volontaires rejoignent ses rangs.


Le débarquement allié du 6 juin 1944 dans la presse

Le 7 juin 1944 L’Argus du Périgord, comme l’Avenir de la Dordogne – les deux principaux titres de presse dans le département – évoquent « une tentative de débarquement anglo-américaine sur la côte normande ». On note que l’information provient de Berlin et que le texte est identique pour les deux titres de presse. On y lit également un message du maréchal Pétain adressé aux Français alors que les combats entre les troupes alliées et allemandes se déroulent sur le sol national.

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L'Avenir de la Dordogne, 7 juin 1944.

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L'Argus du Périgord, 7 juin 1944.

Déclenchement du plan de maintien de l’ordre de Vichy

Le gouvernement de Vichy se prépare à une opération militaire alliée en France depuis déjà de nombreuses semaines. Le 6 juin 1944, la gigantesque opération militaire menée par les Alliés en Normandie déclenche des mesures prévues dans un plan de maintien de l’ordre. Dans un télégramme, le ministère de l’Intérieur aux préfets départementaux de la zone sud d’appliquer les dispositions sur l’organisation des télécommunications (mesures numéro 10 assorties des variantes A, et C à H). Il s’agit notamment de restreindre l’emploi des correspondances téléphoniques, d’assurer ou renforcer la surveillance et la protection de points sensibles de télécommunication.

Le plan régional du maintien de l’ordre devancé par les opérations alliées

Le 7 juin 1944, le préfet régional de Limoges diffuse de manière anticipée le plan régional de maintien de l’ordre auprès des préfets départementaux. Les événements militaires survenus en Normandie devancent en effet la parution de ce plan en préparation.

Le Franc-Tireur du 6 juin 1944 annonce le Gouvernement provisoire de la République française

Le numéro 32 du 6 juin 1944 du Franc-Tireur, journal clandestin du mouvement de Libération nationale, annonce que l’assaut de l’Europe a débuté et rappelle les 100 000 morts de la Résistance. Il annonce également la transformation du Comité français de la Libération nationale (CFLN) le 17 mai en Gouvernement provisoire de la République française (GPRF). Il s’agit pour la France libre d’affirmer son indépendance et sa capacité à assurer la direction des affaires civiles en France, alors que les États- Unis envisagent un gouvernement militaire des territoires occupés (AMGOT : Allied Military Government of Occupied Territories).

Une armée de libération s’affiche

À Domme le 16 avril 1944 la Résistance périgourdine annonce la création d’une IVe République et fixe les prix des denrées alimentaires. Bien que cette affiche soit découverte plus d’un mois avant le déclenchement des opérations alliées, elle témoigne d’un climat insurrectionnel en Dordogne. En effet, l’armée de libération veut se substituer aux autorités du gouvernement de Vichy pour encadrer les prix.

Dès le début de l’année 1944, avant même le débarquement allié, les sabotages du réseau ferroviaire en Dordogne ont pris de l’ampleur

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Sabotage ferroviaire le 2 juin 1944 à Sarlat

Le 2 juin 1944, la station de pompage de la gare de Sarlat est sabotée par la Résistance. Sans cet outil qui achemine l’eau, indispensable à la production de vapeur nécessaire à la traction des machines, la circulation ferroviaire est paralysée dans la région.

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Paralysie du réseau de la Compagnie des chemins de fer départementaux le 9 juin 1944

Le 9 juin la Compagnie des chemins de fer départementaux informe le préfet de la situation de son réseau : des machines sont sous la surveillance de la Résistance et aucune circulation n’est possible. En outre, on note que 12 agents ont abandonné leur service.

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La situation à Périgueux le 9 juin

Le 9 juin le commissaire de police de Périgueux rend compte au préfet de la situation des services de police et de la situation locale...

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...Il fait état de rumeurs sur la position des maquis autour de la ville de Périgueux et sur les mobilisations au sein de la Résistance. On relève la défection de 44 policiers (certains ont rejoint la Résistance).

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1 W 1787

La Résistance contrôle des routes

Le 10 juin l’ingénieur en chef des Ponts et chaussées informe le préfet que la Résistance organise des barrages sur les routes et qu’il ne peut les faire lever.

La Résistance attaque un train allemand à Mussidan le 11 juin

Le 11 juin ce télégramme annonce au préfet que la Résistance a attaqué en gare de Mussidan un train de sécurité allemand chargé d’assurer le contrôle de la voie ferrée. Dans l’assaut du train, 13 soldats allemands et 10 maquisards perdent la vie. Aussitôt les troupes d’occupation organisent une riposte (voir le volet sur la contre-offensive allemande).

Les sabotages ferroviaires s’intensifient : entre le 16 et le 18 juin la police relève plusieurs sabotages ferroviaires sur différentes lignes en Dordogne

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Divers attentats sur voie ferrée

Un rapport de police fait état de sabotages sur le réseau de chemin de fer sur les lignes Périgueux-Brive, Périgueux-Mussidan, Saint-Vincent-de-Connezac-Beauronne et Aubeterre-Petit-Bersac.

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Sabotage du pont ferroviaire dans la région de Saint-Vincent-de-Connezac, le 17 juin 1944. 

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Sabotage du pont ferroviaire à Petit-Bersac, le 18 juin 1944. Ces deux opérations ont été menées par le groupe Bugeaud de l'Armée secrète.

La Résistance réquisitionne du matériel et des fonds

Pour ses besoins, la Résistance réquisitionne du matériel (véhicules, essence, denrées alimentaires et tabac notamment) mais aussi des fonds prélevés dans les trésorerie du département.

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1 W 1809

À Excideuil, les Forces françaises de l’Intérieur (FFI) réquisitionnent des locaux du collège de jeunes filles pour les besoins du Comité de libération de la ville.

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5 W 569 et 5 W 590

Exemplaires de bons de réquisition : le 11 juin pour une bâche saisie à un particulier et le 12 juin pour le tiroir-caisse de la Trésorerie de La Coquille.

Le Jeune patriote : un appel des Forces unies des jeunesses patriotiques

Les Forces unies des jeunesses patriotiques (FUJP) appellent les Périgourdins au combat pour la Libération. Ce document, dont une copie dactylographiée a été établie par la police, a été distribué aux ateliers de la SNCF à Périgueux le 1er juillet 1944.

La CGT de Neuvic et Saint-Astier appelle à la grève

La Confédération générale du travail (CGT) appelle les ouvriers de Saint-Astier et Neuvic à cesser le travail et à rejoindre la Résistance.

En avant pour la Libération

Le Parti communiste français de la Dordogne appelle les patriotes périgourdins à s’unir, s’armer et se battre aux côtés des Francs-tireurs et partisans (FTP), en suivant l’exemple du mouvement insurrectionnel de la Corrèze. On note que ce tract s’inscrit dans l’appel du Gouvernement provisoire de la République française et de son chef le général de Gaulle. Enfin, on remarque l’adresse spécifique aux femmes périgourdines.

Un appel de Vichy et du maréchal Pétain

Le gouvernement de Vichy fait appel au patriotisme des Français en les invitant à ne pas s’engager dans le combat déclenché par les opérations militaires alliées en France.

Des changements à la préfecture

Le préfet quitte précipitamment la Dordogne

Le 24 juin 1944, le Journal officiel de l’État français publie la nomination de Jean Callard à la préfecture de la Dordogne. Sous-préfet de Bergerac, il est nommé dans l’urgence après le départ précipité du préfet Jean Popineau le 8 juin 1944.

L’Inspecteur d’académie prend le maquis et devient préfet dans la clandestinité

Le 7 juin Maxime Roux, Inspecteur d’académie, part en tournée dans la région de Port-Sainte-Foy. Le 12 juin il n’a toujours pas regagné Périgueux. Le proviseur du lycée, qui en cette absence assure l’intérim, en informe le préfet, évoquant des difficultés de communication liées aux événements. Mais il n’en est rien : Maxime Roux a rejoint le maquis. Le 28 juin des renseignements confirment qu’il est à la tête d’une organisation de Résistance.

Le 12 juin 1944, le Comité départemental de libération nomme Maxime Roux préfet de la Dordogne, avec des pouvoirs qui s’appliquent sur la partie libérée du département. Le lendemain il rédige une proclamation adressée aux Périgourdins dans laquelle il évoque une France nouvelle. Il en appelle à la discipline et exhorte à ne céder aucun terrain à l’ennemi.

Les actions de la Résistance

Les destructions d’ouvrages d’art

Avant même la fin du mois de juin, l’ingénieur des travaux publics de l’État (TPE) dresse un bilan des destructions d’ouvrages d’art sur les routes de Dordogne : en deux semaines il relève la destruction de douze ouvrages d’art. Dans l’arrondissement de Sarlat, le commandant de la section de gendarmerie relève quant à lui la destruction de 6 ponts ferroviaires et routiers entre le 6 juin et le 31 juillet 1944.

La situation du département au 15 juin 1944

Le préfet du gouvernement de Vichy, Jean Callard, livre une synthèse au préfet régional sur la situation du département au 15 juin. Il indique que l’isolement du département est quasi complet, qu’il ne peut assurer le maintien de l’ordre et que de nombreux engagements ont lieu dans le département entre les troupes d’occupation et la Résistance.

La situation dans l’arrondissement de Bergerac

Le commissariat des Renseignements généraux de Bergerac dresse la liste des événements survenus dans son secteur pour la période du 8 juin au 2 juillet. On relève notamment la perte des communications, l’encerclement de la ville par des partisans, le bombardement de la poudrerie et les combats de Mouleydier.

Bulletin hebdomadaire du commissariat des Renseignements généraux, semaine du 4 au 10 juin 1944

Le bulletin hebdomadaire du commissariat des Renseignements généraux de la Dordogne n°6792 du 10 juin 1944 livre une synthèse pour la semaine du 4 au 10 juin 1944 : on y trouve l’état d’esprit de la population, les principaux événements et une liste des sabotages.

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