L'Ancien Régime, les femmes dans l'espace privé
Les femmes dans l'espace privé
"Pour les filles, dit-on, il ne faut pas qu’elles soient savantes, la curiosité les rend vaines et précieuses ; il suffit qu’elles sachent gouverner un jour leurs ménages, et obéir à leurs maris sans raisonner."
Fénelon, Traité de l’éducation des filles, 1687
Depuis le Moyen Âge, la femme est considérée comme un être inachevé et imparfait, inférieur à l’homme, lui-même image de Dieu. Parfois idéalisée, notamment en littérature, elle doit être protégée et soumise, dans une société où la famille est, comme l’écrit Jean Bodin en 1576, la "vraie source et origine de toute République", et où la "femme est sous la puissance du mari", conception réaffirmée encore dans l’Encyclopédie au XVIIIe siècle.
Un statut juridique strict, une réalité nuancée
Les femmes sont soumises à la puissance paternelle durant toute leur vie, même parfois lorsqu’elles sont veuves. Juridiquement mineures, les femmes mariées doivent être autorisées par leurs maris pour passer des contrats. Les veuves peuvent jouir d’une certaine indépendance ou se retrouver sans aucune ressource.
Testament de Pierre de Mèredieu, 9 novembre 1627
Dans son testament en 1627, Pierre de Mèredieu lègue la même somme de 5000 livres à ses derniers fils qu’à sa fille Valérie et choisit pour son héritière universelle sa femme Jeanne Alesme, qu’il nomme tutrice et « légitime administraresse de ses enfans et filhes ». B 2981
Enfance et jeunesse
Les filles sont élevées dans le cadre familial où elles secondent leur mère qui leur apprend à tenir leur maison. Malgré l’existence de petites écoles rurales, l’apprentissage de la lecture puis de l’écriture concerne plus les filles nobles et bourgeoises aisées, souvent pensionnaires quelques années dans un couvent. En attendant le mariage, les filles des milieux populaires se placent fréquemment comme servantes, pour se constituer un petit pécule.
Mlle de Grézel, en pension chez les Clarisses de Cahors, demande à son père d’envoyer chercher sa sœur, en mauvaise santé, avec laquelle elle se trouve chez les Clarisses de Cahors. On remarquera la déférence avec laquelle elle s’adresse à son père et la graphie souvent phonétique de cette lettre, très fréquente chez les femmes. L’expression est par ailleurs conforme au modèle de l’époque.
Religieuse, Marie de la Roussie écrit à son père pour lui demander de livrer du bon vin au couvent, pour la « mettre hors des reproches [qu’elle] souffre chaque jour ». Le ton et le vocabulaire employé montrent clairement la soumission de la fille au père.
Le mariage, union des familles comme des individus
Le mariage est tout d’abord un sacrement, indissoluble et basé sur le consentement mutuel. Souvent contracté dans la même classe sociale et le même secteur géographique, il est souvent facteur d’ascension sociale pour l’épouse. Association où chacun a son rôle à tenir, le mariage n’est pas toujours dénué de sentiments : estime et affection sont bien attestés, de même que la violence conjugale.
Le père de Gironne Lachau lui constitue en dot 330 livres, que son époux assigne sur ses biens, quatre brebis suitées, deux robes blanches et une noire, un lit garni, six draps de toile, un coffre. Lors du décès de l’époux, Gironne percevra 60 livres d’uscle et agencement* et en cas de prédécès de l’épouse, Etienne Habriac percevra 30 livres. 3 E 2600
La présentation de cette expédition sur parchemin du contrat de mariage de Guyon de Clermont et de Judith Françoise de Clermont-Piles, le 27 janvier 1581, avec le dessin incomplet des armoiries des deux familles, montre clairement un des buts assignés au mariage, l’union des familles à travers celle des individus.
*L'uscle, autrement appellé agencement, ou encore gain, est une somme convenue à l'avance lors des contrat de mariage, que le survivant peut prendre sur la succession du premier décédé, avant tout autre héritier.
La maternité
« Femme grosse a un pied dans la fosse ». La grossesse est un moment redouté par les femmes, même si, à la fin de la période, les progrès médicaux et l’apparition du métier de sage-femme permettent de réduire la mortalité maternelle et infantile, élevée. Les naissances sont généralement espacées de 18 mois à 3 ans. Les enfants en bas âge sont très fréquemment confiés à des nourrices puis élevés par leur mère ou grand-mère. Souvent vulnérables, les filles des milieux populaires encourent la réprobation sociale et la misère, quand elles se retrouvent enceintes.
En conformité avec la déclaration d’Henri II de 1557, de nombreuses femmes célibataires souscrivent devant les tribunaux une déclaration de grossesse, avec un formulaire relativement répétitif. Cette formalité est souvent suivie par une action judiciaire visant à obtenir du père un soutien financier pour subvenir aux besoins de la jeune femme et de l’enfant à naître. On peut remarquer ici que Marie Laurent a signé sa déclaration, témoignant ainsi d’une instruction minimale.
Les femmes célibataires
Pour les filles de la noblesse et de la bourgeoisie l’entrée en religion permet aux familles de réduire le nombre de parts de l’héritage et de préserver le patrimoine. On rencontre également des filles célibataires, qui vivent chez leurs parents ou chez leur frère ou bénéficient de pensions qui leur autorisent une petite indépendance. Les veuves sans ressources et les épouses abandonnées ainsi que les servantes, souvent dans une grande détresse économique et affective, les vagabondes, sans domicile fixe, apparaissent fréquemment comme victimes dans les sources judiciaires.
Filles célibataires, elles touchent une pension de 120 livres de leur neveu de Madaillan.
Veuve sans ressources avec quatre enfants, elle demande à son beau-père le versement des 40 livres prévues par son contrat de mariage, « afin qu’ils ne se perdent de faim ». Son beau-père, malade, ne peut prendre les enfants en charge ni payer la somme demandée.
Signatures de l’abbesse et des religieuses du Bugue sur un acte notarié, 1615. 3 E NC
En vitrine
Vous trouverez ici les documents proposés en vitrine lors de l'exposition aux Archives départementales en 2022.
(des transcriptions sont consultables en cliquant sur les trois points en haut à droite de l'image)
En 1643 Isabeau de Rochefort de Saint-Angel, met au net un « écrit qu’elle a fait depuis sa naissance selon la mémoire qu’elle en a conservée » et livre ainsi la relation des faits de sa vie. Ce document, conservé en raison des clauses testamentaires qu’il comporte est exceptionnel pour deux raisons : en raison de sa date, relativement précoce pour un récit de vie au XVIIe siècle, émanant qui plus est, d’une femme de près de quatre vingts ans ; en raison de sa nature autobiographique, Nous sommes bien ici en présence d’un récit de naissance et d’enfance, et plus encore d’un récit de vie. En 1579, Isabeau de Rochefort de Saint-Angel, protestante, épouse Jean-Baptiste de Larmaille, qui décède une quinzaine d’années plus tard. Elle évoque son mariage en ces termes [orthographe modernisée] « J’eus l’honneur de demeurer en sa compagnie seize ans entiers avec tout contentement, bien que nous fussions différents en âge et en religion, ayant vingt cinq ans de plus que moi, avons néanmoins vécu avec toute sorte de paix, d’union et d’intelligence qui se peut souhaiter avec mariés ».
Puisqu’il a plus à Dieu m’avoir condduct en ce mois de jun le 23 jun 1643 en bonne santé cellong mon eage en bon sans, clers entendement et mesmoyre graces à sa bonté, je me suis resolue de mettre au net ung escrit [q]ue j’avés fet depuis ma nessence cellong la mesmoyre que j’en ay concervée avec toute ver[ité] de ma maint et sans lunettes s’il plet à Dieu m’en donner le temps. Il et donq aincy que je naquis à Byrong là où Madamoyselle ma grend mère quy ne ce voullut jamais apeller autrement et ma mère Madame de Saintegel et Madame de Teobont et force aultres de la famille c’estoit retyrées à quause des troubles contre ceux de la relyjiont - les premiers quy onq esté en France. Je nequis donc en ce lieu là au mois de settenbre -tent bien marqué - et fus portée en batteme par Monsieur de Chomon mon oncle d’alliance, jentylhomme de très bonne reputtactiont et par Madamoyselle de Genissac ma grende mère et unne des plus sages et verteuses fame de Frence, batysée par ung ministre de l’eglise reformée, laquelle à trois mois me fit enporter avec des brencars par des hommes à Villeneuve là où je fus nourrye jusques à neuf mois, de là à Genissac où je fus ellevée jusques à l’eage de 8 ? eans avec force soing en l’escolle d’une des plus verteueuses fame de Frence et quy avet les plus belles nouritures quy ce pouvét voir et c’estent resollue que je ne partyrés de sa conpagnye que pour aller avec [celle] d’ung mary et de ne m’ellongner pas d’auprès [elle], desirant que je fusse celle quy l’aconpagnasse au tunbeau comme il aryva, ny ayant nulle preu[ches] que moy quy m’en aquitté avec Monsieur mon mary le meiux quy me fut possyble et nous tesmongna à sa fin estre fort contente de nous, n’ayant à la fin et plusieurs années d’auttre preuches quy l’apuyasse[n]t
ny après sa mort pour la concervactiont des [lacune]. Il avint donc qu’end l’année mille sinc sans soiss[ante] dyseneux le sissieme d’ottobre, je fus maryée à Monsieur de Larmavaille, chevallier de l’ordre du roy et jentilhomme ordynere de sa ch[ambre] quy avée hu de de tres beles et honorables ch[arges] pour le service du roy et s’en estet aussy [bien] aquyté que homme ay jamais fet des [lacune] et en homme de bien quy a fait qu’yl et[1] mort pouvre de biens més fort d’onneur. Je hu l’onneur de demeurer en sa conpa[nie] cese ans entiers avec tout conten(te)tement bien que nous fussions différens en aeage et en relyjiont, ayent vinsinc ans plus que moy [et] avons neamoyns vescu avec touttes sortes de p[aix], d’unyont et d’intelygence quy ce peut souetter avec maryés. Il me lessa en son dessès trois filles, l’enée avoit trese ans, la segonde douze, la tierce neuf, lesquelles j’élevé a[vec] soint et affectiont et marryées avec trois jentis hommes de fort bonne nessence et personnes quy estét en estyme et honeste [lacune] de quoy ils sont tous trois decedés jeunes et [ont] lessé de grens familles. Je n’é plus que ma jeune fille, Dieu la concerve et sa famille et les auttres quy sont en grend nonbre et sans d[lacune] de nature et ceux quy sont en age des de[lacune]apces en estyme, Dieu soit leur conduitte, preservent d’inconveniant n’estyment les richesses au pris de l’onneur. Je vins veve et ceparée de ma chère conpagnye en l’année mille sinsans quattre vins quinse au mois de novembre, agée de trente deux ans et la cegonde année avec de grend procés et [autres] quy me furet sussistés injustement, le premier par la fille d’un premier maryage quy ce dis[et]
l’eritiere. Dieu me fit la grace de la renvoyer honteusement et de concerver le bien pour mes filles et à la suitte plusieur aultre prossès de toutes les aquysictions que feu Monsieur mon mary et moy avions fait ensemble de la Brède et de Grossonbre, quy m’ont coutté à concerver plus que le premier achat, celluy de Grossonbre a duré dyset ans les ariés( ?) le font voir et trensactions et nonostent je l’avés aumanté en battyment ou aquisition de mille escus. Jamais fame de ma condictiont ne c’et plus cattyvée que moy aux affaires ny n’a pris plus de pene pour concerver le bien de ces anfans. L’amitié que j’avés portée à feu monsieur mon cher mary et la confiance qu’yl avet avec moy m’a du tout atachée à ce soin quy a esté quause que je n’é jamais voulu entendre à chengé de condiction bien que je puis dire avec veritté et sans vanitté que je trouvé des partis fort aventageux de robe longue et d’aultres de condictiont fort relevée. C’et ung des plus grens doncs que je loue Dieu m’avoir donné que celluy d’avoir demeuré en vyduyté et m’avoir conduitte jusques ycy sans avoir blecé ma reputtactiont quy soit jamais venu à ma connessence, grâces très humbles luy en soit rendue, le suplyent me condyre jusques à mon trespas et me faire mysericorde pour soultenir de cy grens affaires et charges des mesons que je posedes. Je porté plusieurs sommes nottables pour ayder à marier les filles, maryent ma fille ennée, je prins les quattre mille lyvres que j’avés porté en maryage que je preté pour payer Madamoyselle du Cros, à mon jendre [je] pretté mille lyvres pour payer ung dette qu’il avoit fet avent ce maryer. Je ressus neuf mille lyvres d’unne donnactiont que Madame d’Estenges avée donné, mille lyvres quy m’ettet du de mon maryage, quattre mille sinc sans lyvres d’une donnactiont de fu Madame de Chomont,
ma tente, et autres sommes que j’é enployées pour souttenir les prossés et ayder à maryer les filles. Je pretté à mon jendre mille escus pour donné à ma fille de Château, comme il paret par son contrat de maryage, je payé douze sans lyvres du maryage de ma fille de Trieuls à la descharge de ma fille enée, à Ysabeau Saubat comme il apert par son premier contrat de maryage avec Monsieur de Canteloup, et auttres sommes. Je suporté tous les procés à mes despans bien que je n’y estés pas tenue, comme il apert par unne trensactiont que je passé avec mon jendre lorsque je m’acordé de prendre le manyement de la mesont pour huict ( ?) ennées quy me cuydaret ruiner ; nous n’avions voysins quy ne c’estonna à la despence que je suportés, grâces à Dieu. Je m’en retyré avec honneur et ne lessé d’avoir tousiours s[outenir] des procés et fus oblygée de battir avec force incommoditté et disvertissement, ayent encore ma jeune fille à maryé. Je sorty du tout avec honneur, Dieu mercy, et sans tent de traverce que je hu jusse achevé le dessaint de mond. battyment, me voyant cy avencée en eage, et ne fesent plus d’ettat du monde, souettent de m’en detaché et mestre mes plus gren soins a meditter le ciel, le temps qu’yl a plu à Dieu que je demeure au monde, le suplyant en toutte humillitté de voulloir conduire touttes mes actions à son honneur et gloire et à mon sallut et a l’ydiffyactiont de mes prochens. Gloyre soit au Père, au Filz et au Sainc Esprit, la Sainte Trinitté. Ament.
Y. de Saintevel de Rochefort
Je fis donc mon dessaint de m’oster ors des soins de menage et de m’aller tenir à Lybourne, plus proche ville de mes commodittés, pour estre près de l’essercis de ma relyjiont et voulant faire et suivre le dessain que j’avés fait il y a longtems de faire mon erytié le fils ené de ma fille de Larmavaille puisque c’estét elle que j’avés eslue l’erytière de son père cellon le pouvoir quy m’en avét lessé et aussy j’avés promis à feu Monsieur mon mary que je ballierés mes acqués à celle que je constytuerés song eritière et aussy c’ét celle de mes filles que que je n’é jamais receu de des plesirs estent morte en ma relyjiont. Pour ces enfans j’en ay fort ressenty pour ce suget, Dieu leur face myserycorde. J’é donc ellu mon eritier Louys d’Aix par unne donnactiont faitte à Genissac, chose que j’avés prottesté ne faire jamaix que par testament. Je fus du tout aveuglée et estourdye que je ne pancés sur ma foy et honneur ne faire que confirmer mon testamant que j’avés fait et escrit de ma maint, tous ces discours tyrét à mon desaventage loué soit Dieu et de plus je lessé à mon pettit fils Monsieur de Grossonbre la possection de ma meson et revenus avec certenes condictions et avec fort peu de condictiont et reservactiont cellong ce que j’é donné par la donnactiont à ma fille de Château mille escus. Je n’é jamés entendu que les enfans de ma fille de Trieuls en husse moins cy ce treuve autrement ils m’ont surprise, je les desavoye. Foy j’entens qu’elle en aye autent. Je donné à ma fille Dumas, en la maryan mille lyvres que je veux qu’y ly soit payées incontynent après mon depcès. Je veus et entemps que la somme de trois sanc lyvres que je devés à feu Jane de Lassycourt oit payée à ces eritiers incontynent après mon dessès comme m’ayant esté bien et loyaut prêt de la dite Jane de Lassycour apellée Melle de la Bory à montrés bon besoint pour poursuivre des prossès de très grend inportence ; je l’usse payée il y a longtems sy j’usse su aquy.
Ayent trouvé par plusieurs consultacti[onts] à Paris, à Bourdeaux et aultres lieux la s[ucce]ctiont ouverte en ma faveur de Louys de Pierre Buffière et Ysabeau de Ségur, mon grend père et grend mère m’apartenét comme estent ouverte en ma faveur. J’en avés intenté procès et fet donnactiont à mes trois familles, tiers pour tiers de ce quy en proviendret, en poursuivent à leur despans. Monsieur de Château quy est le ceul gendre quy me restét s’acorda avec un neveus d’en faire la poursuitte, lequel fit ung voyage à Paris et avet mis l’affaire en traint et y contrybuét tiers pour tiers estent sur le point d’y retorner pour la segonde fois ; Dieu le rytyra à soy. Je taché tent qu’y me fut possyble de persuader ung des trois de mes familles d’entreprendre ceste poursuite, les voulant assisté de tout ce que j’usse peu. Il ne m’a esté possyble, donc il m’en reste ung regret quy m’aconpagnera au tonbeau car je ne croyés rien plus certeint quy leur en reviendrét pour le moins sanc mille lyvres quy les hut bien aumentés et unne estrengère a tout enporté. J’avés aussi intenté ung prossès pour demender mon suplément de lejytyme sur les biens de St Angel de feu Monsieur mon père donc j’avés hu fort peu. J’en pretendés pour le mois quattre mille escus, l’ung et l’aultre m’avét bien coulté et faute que personne n’a voullu poursuivre pour moy, tout c’et perdeu. Loué soit Dieu je ne suis pas née pour les biens terriens, je le suplye me donner ceux du Ciel. Je fay tous ces discours pour faire voir à mes preuches que je n’é pas esté ynuttille au monde et qu’y[l] n’a tenu à moy que je n’aye aumenté le bien de mes familles. Il ce voit conbien j’en ay enployé pour avoir concervé du mien propre celluy que nous possédions. Il y en ara quy ce moqueront de mes discours, je n’entent pas quy ce voye que parmy mes plus preuches.
Il est esé de me reprendre mès malesé de faire mieus. La sattiffactiont que j’en ay après la paix de ma conciance de croipre estre sans coulpe à tout cella et de contenter mon esprit puisqu’il plet à Dieu de m’en donner le temps, de quoy je luy en rans très humbles graces. Je suis en ce lieu du Mas là où je me tiens il y a quelque temps où je maryé unne de mes pettittes filles de Trieulx et croy estre dans les soissente dise neuf ans, escryvent encore de ma maint et sans lunette et en bonne mesmoyre, sans et antendement et aultre dons partyculliers pour ma santé et disposictiont de ma personne cellon mon eage, loué soit Dieu, la princypal de ces grace que j’é à le remercier c’et de m’avoir concervée jusques yci en la relyjiont que j’é esté batysée, nourrye et ellevée, bien que je diré sans vanitté que j’é esté autent solicitée que fame de Guienes de ma condictiont avec de euffres fort aventajeuses quy m’ont esté offertes par des personnes de relevée condiction ; tout cella ne m’a point esbranlée bien que j’usse de grens affaire sur le bras c’et à Dieu à qui j’en rens très hunbles grace quy m’a fait sussister et conduire avec honneur jusques à cette eure. Je le suplye de me voulloir aconpagner de son sainc esprit à mont trepas et me faire myserycorde par le meritte de mon Sauveur Jesus Chrits, quy vit et rene esternellement. Gloyre soit au Père et au Filz et au Sainc Esprit, la Sainte Trenitté duquel les euvres sont incepa[rables] et l’enpyre esternel. Aincy soit-il.
J’achevé donc cet escrit ce 10e julliet 1643 en ce lieu du Mas, parroisse de Genissac. Ecrit et singné de ma main.
Y de Saintengel de Rochefort
Puisqu’il a plu à Dieu m’an donner le temps, je mettré en ce cotticille que je (je) veux et entens que ce que m’a donné Mercier, qu’es trois sanc lyvres soit donné à mes trois filles de Château, le reste à l’église de Libourne, pour estre mise en fons. Pour ce que me doit Monsieur Damours, j’en donne et lègue à Madamaselle de Martynet sanc lyvres ; pour les quarante esqus que me doit Monsieur de Grossombre je le donne et lègue à Ysabeau Duclusel, ma fillieule, comme estent de l’arjent de Monsieur de Frotto que je me suis réservée néeenmoi pouvoir je n’entens en nulle fasont avoir interés cette somme, més croyés n’estre réservées par la donnactiont mille lyvres pour à disposer ???
Je lègue à Jen Eraut dis escus quy ét mon fillieul et fils de mon premier fillieul. Je rachetté de Monsieur Bannes frère de Monsieur Dumas un plat et unne salière d’arjent et luy ét fait droit .. de divers obligés de sinquante escus quy m’avet pretté an..gyen besoint Monsieur de Gr… avét promis le rettyrer il me dit ne le vouloir faire par hone[ur] je l’é fet.
Voilla tout ce que je (ve) veus dire que prier Dieu quy veuille bénir mes intentions et me recevoir en sa grâce.
Puisqu’an tout testament ou codicille il ét né[ce]ssere ellyre ung escutteur d’yceluys, n’ayant pres de moy de plus preuche que Monsieur de Jénissac, mon très honoré et cher neveu, jentylomme très prude et sage et inesty de tant de valleurs et mérittes, je le conjure d’agréer le choit que je fait de sa personne pour escuter cette miene (vol) dernière volonté et en toutes autres affaires quy ce pourét mouvoir par ung mes preuches je le suplie très hubleme[nt] y aporter la pais que je demende à Dieu pour nous tous. Gloyre soit au Père et Filz et au Sainct [Esprit] ainsy soit-il
Y de Santangel de Rochefort