Les femmes en révolution

Femmes en révolution(s)

« Les mères, les filles, les sœurs, représentantes de la nation, demandent d’être constituées en assemblée nationale. Considérant que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de la femme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont résolu d’exposer, dans une déclaration solennelle les droits naturels, inaliénables et sacrés de la femme (…). »

Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, 14 septembre 1791

Rupture dans l’histoire de France, la Révolution de 1789 balaie les fondements de l’Ancien Régime et prône l’universalisme avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. D’abord hésitante, la Révolution finit par exclure les femmes des formes actives de la citoyenneté (participation au suffrage, éligibilité, participation aux associations).

Citoyennes condamnées à l’inaction

Les archives publiques sortent de la pénombre quelques femmes, bien décidées à être les actrices de la Révolution. À Beaumont-du-Périgord, le registre de la Société des Amis de la Constitution met en lumière la « citoyenne, femme du citoyen Carrière dit Lafond » ou la « femme de Grimard dit Guinot », qui intègrent cette société politique locale. S’y faire une place n’est pas aisé ; les femmes assistent aux discussions mais sans voix délibérative.

Registre de la Société des Amis de la Constitution de Beaumont, 21 juillet 1792 - 7 décembre 1793. 13 L 3 1 2
Registre de la Société des Amis de la Constitution de Beaumont, 21 juillet 1792 - 7 décembre 1793. 13 L 3
Registre de la Société des Amis de la Constitution de Beaumont, 21 juillet 1792 - 7 décembre 1793. 13 L 3 2 2
Registre de la Société des Amis de la Constitution de Beaumont, 21 juillet 1792 - 7 décembre 1793. 13 L 3

Dans l'opposition

À l’opposé, les Filles de la Foy de Beaumont-du-Périgord (22 religieuses et 3 sœurs converses en 1790) s’affirment comme des opposantes à la politique anti-religieuse et anticléricale révolutionnaire. Convoquées par l’administration municipale pour prêter publiquement le serment prévu pour les « personnes chargées de l’enseignement public », elles ne se présentent pas. Par voie de pétition, elles exposent leurs griefs à l’administration départementale, qui leur donne en partie raison.

Pétition des Filles de la Foy, pétition n°150, 2 août 1791. 1 L 185 1 2
Pétition des Filles de la Foy, pétition n°150, 2 août 1791. 1 L 185
Pétition des Filles de la Foy, pétition n°150, 2 août 1791. 1 L 185 2 2
Pétition des Filles de la Foy, pétition n°150, 2 août 1791. 1 L 185

« que cependant elles ne peuvent être tenues à ce serment puisque ce n’est que volontairement et sans recevoir aucune espèce de salaire qu’elles ont prêté leur soin à l’éducation de quelques filles qui leur sont confiées par les parents »

La fin de la Révolution met un terme à cette effervescence féminine. Sous le Consulat et l’Empire (1799-1814) les nouveaux cadres législatif et judiciaire légalisent l’infériorité des femmes. Désormais cantonnées aux rôles d’épouses et de mères, elles sont reléguées dans la sphère privée. Les révolutions de 1830 et 1848 créent d’éphémères brèches : les femmes reprennent la parole sans être entendues.

Les Trois Glorieuses

Les femmes sont présentes durant le mouvement de contestation politique qui culmine lors des Trois Glorieuses (27, 28 et 29 juillet 1830). La presse périgourdine mentionne brièvement leur participation aux mouvement insurrectionnel parisien. En Dordogne, les archives, même privées, taisent les opinions féminines. En 1830, Marie Grolhier se confie à demi-mot en relatant les propos de son père, le conventionnel Allafort. Son idéal de « liberté » est brisé net : Louis-Philippe devient le roi des Français.

Écho de Vésone – 14 août 1830 1 2
Écho de Vésone – 14 août 1830
Femmes et enfants durant les journées de juillet 1830 (Écho de Vésone, 1er août 1830, extrait) 2 2
Femmes et enfants durant les journées de juillet 1830 (Écho de Vésone, 1er août 1830, extrait)
Lettre de Marie Grolhier, 1830. J 2001
Lettre de Marie Grolhier, 1830. J 2001

Toujours oubliées

Après la chute de Louis-Philippe, la Seconde République se construit sans les femmes. Dans leur grande majorité, elles assistent, simples spectatrices, aux manifestations qui marquent l’avènement du nouveau régime : lors des banquets patriotiques, elles sont cantonnées dans une mission traditionnelle, "soulager les malheureux". Pourtant, certaines n’abandonnent pas l’idée d’être actrices de leur histoire. Les "femmes de 1848", féministes adhérentes de La Voix des Femmes, multiplient les pétitions : le 30 avril 1848 L’Écho de Vésone se fait l’écho de leur demande de reconnaissance des droits civiques des femmes. Malgré cela, le suffrage universel, instauré en 1848, demeure réservé aux hommes, maintenant les femmes aux marges de la vie politique.

Écho de Vésone, 25 mai 1848 ; Banquet patriotique de Cherveix. PRE 417 1 3
Écho de Vésone, 25 mai 1848 ; Banquet patriotique de Cherveix. PRE 417
Écho de Vésone, 30 avril 1848. PRE 417 2 3
Écho de Vésone, 30 avril 1848. PRE 417

2ème colonne ; publication de la pétition de la Société de la voix des femmes aux membres du gouvernement provisoire de la République française

Loi électorale du 31 mai 1850 Le 2 mars 1848, le gouvernement provisoire a déclaré électeurs tous les Français âgés de plus de 21 ans. 3 M 1 3 3
Loi électorale du 31 mai 1850 Le 2 mars 1848, le gouvernement provisoire a déclaré électeurs tous les Français âgés de plus de 21 ans. 3 M 1
Partager sur