Le sacre inachevé des citoyennes ?

Le sacre inachevé des citoyennes ?

"Maintenant qu’est-ce que l’affranchissement politique de la femme ? C’est l’avènement de la femme au droit qui confère le pouvoir de faire les lois : par soi-même, si l’on est élu député ; par délégation, si l’on est électeur. Donc il ressort de toute évidence que le droit politique est pour la femme la clef de voûte qui lui donnera tous les autres droits."

Hubertine Auclert, La Citoyenne, 13 février 1887

C’est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale que l’Assemblée consultative d’Alger, par ordonnance du 21 avril 1944, déclare : « Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes ». Dès l’année suivante, les élections concrétisent cette (r)évolution dans les mentalités : les Françaises jouissent enfin de la pleine citoyenneté.

« Les femmes veulent voter » La Voix socialiste, 3 et 4 mars 1945 1 2
« Les femmes veulent voter » La Voix socialiste, 3 et 4 mars 1945
Ordonnance du 21 avril 1944 2 2
Ordonnance du 21 avril 1944

Électrices et candidates

Les élections municipales d’avril et mai 1945 inaugurent la présence de femmes comme électrices et candidates. Les procès-verbaux des élections témoignent des premières victoires féminines. À Saint-Lazare, Céline Bardou est élue maire de la commune en 1945. Cependant, ces premiers scrutins montrent la difficulté pour les femmes qui prétendent se mêler de politique de se passer de parrainage masculin. Andrée Méredieu, candidate de la liste du Rassemblement des Gauches Républicaines, « partage sa popularité avec son mari ».

Procès-verbal des élections municipales, 29 avril et 13 mai 1945. élection de Céline Bardou à Saint-Lazare. 1 W 1322 1 2
Procès-verbal des élections municipales, 29 avril et 13 mai 1945. élection de Céline Bardou à Saint-Lazare. 1 W 1322
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🔈 Raymonde Delemasure, une expérience en politique 

Raymonde Delemasure livre un témoignage doux-amer de son expérience politique de 1945 à 1995.

À partir des années 1950-1960, un nombre croissant de femmes s’engage en politique, notamment en militant dans les instances locales des différents partis. Les femmes élues restent cependant peu nombreuses. Ces deux décennies sont aussi marquées par la naissance d’un nouveau militantisme autour de la «condition féminine». 

Réunion de la section locale du parti socialiste en présence d’Yvette Roudy (au centre), future ministre des Droits de la femme sous le gouvernement de F. Mitterrand en 1981, v. 1978. L’ouvrage devant la participante de gauche est La Condition féminine, paru aux éditions sociales en 1978


Des femmes peu nombreuses...

Dans les années 1950, les femmes faisant carrière durablement en politique sont l’exception. Aux élections législatives de 1956, Germaine Morize, récompensée pour son dévouement « à la jeunesse et aux déshérités », est présente sur la liste du RGR mais à la quatrième place. Sous la Ve République, cette « République des mâles », les hommes restent à la tête des partis et lors des scrutins, les femmes ne sont jamais en tête de liste. 

« Liste du Parti républicain radical et radical-socialiste et du R.G.R. » Sud-Ouest, 19 décembre 1955 1 2
« Liste du Parti républicain radical et radical-socialiste et du R.G.R. » Sud-Ouest, 19 décembre 1955
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Germaine Morize. 14 Fi 321/3
Germaine Morize. 14 Fi 321/3
« Catherine la benjamine » Sud-Ouest, 24 mars 1983
« Catherine la benjamine » Sud-Ouest, 24 mars 1983

...mais engagées

La mairie semble être le lieu de pouvoir le plus accessible aux femmes. En 1983, Catherine Joffre, 24 ans, est la plus jeune maire de Dordogne. Sa victoire est relatée par Sud-Ouest dans un article aux relents quelque peu misogynes. 


Première adjointe

Quelques femmes comme Paulette Labatut parviennent à ancrer leurs engagements politiques sur la longue durée. Gaulliste, elle est élue à Périgueux à partir de 1971 et devient même première adjointe en 1989. Cette même année, elle est "désignée par Yves Guéna" pour le remplacer lors de l’élection cantonale de Périgueux-centre, qu’elle remporte haut la main. En 1992, il y a quatre femmes conseillères générales dans une assemblée de 50 élus…

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