Une éternelle mineure

Une éternelle mineure

« Qu’on ouvre le Code civil, qu’on lise tout ce qui concerne la femme, et l’on se demandera d’où sont sorties ces lois barbares par lesquelles non seulement la femme est condamnée à une tutelle éternelle mais aussi à voir sa dignité comme épouse rabaissée… Où sont inscrits nos droits ? Nulle part, et partout une main de fer a inscrit notre abaissement et nos devoirs ! »

Eugénie Niboyet, La Voix des femmes, n°4, 24 mars 1848

Au XIXe siècle, la vision bourgeoise de la femme, « ange du foyer » au coeur de la famille, domine la société. Le Code civil légalise l’infériorité féminine proclamée par le discours scientifique et par l’Église : incapacité en matière civile, inégalité entre les époux, suppression du divorce en 1816.

Le mariage, destinée des femmes

L’éducation, les jeux et l’enseignement préparent la petite fille au mariage, union de raison plus que d’amour, comme à l’époque précédente. Les tentatives pour échapper à ce modèle et conclure une union basée sur les sentiments personnels sont peu nombreuses et souvent vouées à l’échec. Le mari adultère n’est que rarement sanctionné, à l’inverse de la femme, qui n’obtient que très rarement la séparation de corps ou le divorce à partir de 1884.

Le livre de piété de la jeune fille au pensionnat et dans sa famille. 22 J 461
Le livre de piété de la jeune fille au pensionnat et dans sa famille. 22 J 461

Cet ouvrage très répandu, ayant connu de très nombreuses éditions, prône une éducation faite de renoncements et de soumission, de modestie et de réserve, pour préparer la jeune fille à sa vie de future mère et maîtresse de maison, hors de toute préoccupation intellectuelle.

Procès de Pierre Dunoyer qui a chassé du domicile conjugal sa femme puis sa maîtresse. 5 U 999 1 41
Procès de Pierre Dunoyer qui a chassé du domicile conjugal sa femme puis sa maîtresse. 5 U 999

Acte d’accusation de Pierre Dunoyer. Si l’adultère de la femme est durement sanctionné, celui du mari n’est admissible en justice que s’il a installé sa concubine au domicile conjugal. C’est le cas ici, où Pierre Dunoyer chasse
alternativement sa femme et sa maîtresse lorsqu’elles sont enceintes. Il est condamné à 16 francs d’amende le 4 juillet 1843.

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L’Avenir illustré, 5 mai 1905
L’Avenir illustré, 5 mai 1905

Une conciliation devant le juge vue par le caricaturiste « Je ne peux plus rester avec cet arsouille qui se saoule tous les jours… Pour vous faire plaisir, M. le Juge, je veux bien le garder mais à la condition qu’il m’emmènera boire avec lui ! ».

La maternité, but du mariage, devoir national

Au sein de la famille du Code civil, le rôle premier de la femme est d’être mère. À partir de 1875 environ, l’État promeut une politique familiale nataliste. Parallèlement, les progrès de la médecine et de l’hygiène rendent l’épreuve de l’accouchement moins redoutable et réduisent la mortalité maternelle et infantile. Corollaire de cette politique nataliste, la répression de la « propagande anti-conceptionnelle et de la provocation à l’avortement » (loi de 1920) fait des avortements clandestins, infanticides et abandons d’enfants une constante des XIXe et XXe siècles jusqu’aux lois Neuwirth et Veil. 

Extraits du procès de Jeanne Galant pour infanticide. 2 U 169 1 3
Extraits du procès de Jeanne Galant pour infanticide. 2 U 169

Jeanne Galant, accusée d’infanticide : déclaration du jury, 22 juin 1839. La justice pénale connaît régulièrement d’affaires d’avortement et d’infanticides. On constate cependant avant 1920 une certaine indulgence de la justice.

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Rapport du préfet sur la mortalité infantile, 20 décembre 1908. 3 X 20 1 2
Rapport du préfet sur la mortalité infantile, 20 décembre 1908. 3 X 20

À Périgueux, en 1908, les conditions d’accueil des femmes enceintes sont déplorables, tant en qui concerne la prise en charge médicale que l’hygiène.

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L'envers du décor

Les violences contre les femmes, notamment domestiques, ne sont pas rares et, depuis le début du XIXe siècle, les magistrats s’évertuent à rendre légitime l’intrusion de la justice pénale dans la sphère privée. Dans les années 1970-1980, les violences conjugales sortent de l’ombre grâce aux mouvements féministes, mais elles ne sont considérées comme des circonstances aggravantes qu’avec la refonte du Code pénal en 1994. 

« Fin tragique d’une idylle » L’œil de la police, n°6, 1909

Acte d’accusation de Jean Froidefond, pour le meurtre de sa belle-mère et de sa fille, 15 juin 1829. 2 U 148
Acte d’accusation de Jean Froidefond, pour le meurtre de sa belle-mère et de sa fille, 15 juin 1829. 2 U 148
Acte d’accusation de Jean Froidefond, pour le meurtre de sa belle-mère et de sa fille, 15 juin 1829. 2 U 148
Acte d’accusation de Jean Froidefond, pour le meurtre de sa belle-mère et de sa fille, 15 juin 1829. 2 U 148

« Drame de la mésentente à Augignac » Dordogne Libre, 22 octobre 1985

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